Ils viennent se cogner à nos lèvres À l'heure où sortent les lièvres En espérant qu'ils ne soient pas mièvres Et qu'ils ne provoquent pas la fièvre Les premiers sont souvent inaudibles Puis ils deviennent très sensibles Ils rendent les rêves possibles On les adresse tout droit vers la cible Ils ont le pouvoir de tout dire Le meilleur comme le pire Ils peuvent aussi parfois faire rire Mais ce que je préfère, c'est les écrire L'encre coule alors comme un sang neuf Ils sortent comme un poussin de l' oeuf Ils sont éternels, qu'on ne peut pas être veuf Ils éclatent sur les murs lors d'une teuf Certains les utilisent pour être provocateur Et donner des divertissements aux spectateurs Que l'on soit pro ou bien amateur Ils ont la faculté d'être salvateur Les menteurs aussi les utilisent Pour cacher la vérité et la foule se galvanise Mais bien souvent ils brisent Les silences qui nous nuisent À chaque fois que j'en vois un J'ai envie de le caresser, lui donner un câlin Et le porter haut sur un calepin Alors il prend sa place l'air malin Ils mettent soudain le feu aux poudres Attirant partout les foudres Qu'on a du mal alors a recoudre Les plaies, que d'amour on saupoudre Jolis, exquis on veut les offrir comme un cadeau On les porte dans un sac à dos La méduse aussi a son radeau Mais heureusement on ne les mange pas ces mots On ne les mâche pas non plus Ils ont un sens dans les campagnes, dans les rues Une histoire qui longtemps fut Disloquée, détournée, envoyée au rebut Ils s'organisent par moment vulgaires Qu'ils alimentent les conflits, les guerres On peut aussi comme Daguerre Les photographier et se rappeler de naguère On pourra en dire long encore Pour parler d'eux et on ressort Les anciens verbes et les rapports Se multiplient jusqu'au dernier port Poètes, académiciens ou bien vauriens Le vocabulaire s'enrichit avec celui de chacun Qu'ils soient familiers et soutenus bien Ils servent depuis toujours notre prochain En définitive, on ne peut s'en passer De ces mots qui nous rendent jamais harassés Et si ils venaient à se casser Qu'ils éclatent en mille morceaux pour qu'on aille vite les ramasser Et s'en faire des colliers autour du cou Et que de Bruxelles jusqu'à Moscou On arrime à nos coeurs et qu'on secoue Les mots pour qu'il n'y ait plus de remous.
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